Histoire et mémoire africaine à l'heure de la mondialisation:
Enjeux et repères
L'écriture de l'histoire africaine soulève toute une série de questions qu'on ne saurait occulter. Parmi ces dernières, celle de savoir si la lecture que les peuples d'Afrique ont du passé de leur continent leur donne des balises suffisamment pertinentes pour leur permettre de capitaliser les expériences d'hier et prendre en charge leur destin, aujourd'hui et demain. Tout aussi cruciale l'émergence d'une mémoire débarrassée de tares du discours colonial et s'inscrivant dans une véritable prospective car on ne peut se développer avec la mémoire d'autrui.
Le passé est une somme d'expériences comportant d'innombrables leçons pour l'avenir. Prétendre que l'Afrique fut une table rase au plan politique, scientifique, technique a imprégné bien des discours d'antan conforme à la vulgate coloniale avec sa propension à la minorisation tendant à assimiler le riche passé africain à une succession des siècles obscurs.
Ces positionnements d'antan redevables davantage à l'idéologie qu'à la rigueur des faits aura porté les Africains à des mimétismes stériles qui n'ont fait qu'accroître leur dépendance.
De 1960 à nos jours, les recherches en histoire africaine ont véritablement révélé des « terrae incognitae », éclairés des pas obscurs et contribué à restituer son visage à un continent au passé défiguré.
Au cours de notre séminaire l'histoire africaine sera abordée à la fois dans sa globalité et sa complexité; l'accent sera mis à la fois sur ses dynamiques internes et externes. Nous mettrons l'accent sur la diffusion des techniques, l'organisation sociale et économique, sur les traits culturels des peuples. Nous n'occulterons pas les problèmes spécifiques ainsi que les difficultés bien réelles que pose l'écriture de cette histoire et notamment en termes de sources et de méthodologie. Nous dégagerons à la lumière des plus récentes études la continuité historique depuis l"Egypte ancienne" à nos jours. Nous mettrons en lumière l'importance de la tradition orale comme source de l'histoire.
Le terme mondialisation n'apparaît pas dans notre propos par hasard : D'aucuns ont prétendu que l'Afrique en raison de "son passé" avait du mal à s'intégrer dans les réseaux d'échanges qui restructurent notre monde d'aujourd'hui, que sa culture est celle "de la stagnation" voire du rejet de l'autre.
Et pourtant l'histoire nous apprend la densité des réseaux d'échanges au cours des siècles écoulés comme la capacité des peuples à réaliser des symbioses remarquables .L'ancienneté des structures étatiques est tout aussi incontestable.
Les objectifs du Séminaire sont les suivants:
- Pallier les carences voire l'absence dans le cursus universitaire de cours et formation accessibles à tous portant sur l'histoire de l'Afrique;
- Doter les participants de balises nécessaires à la compréhension du parcours spécifique des peuples africains depuis la préhistoire jusqu'à ce jour;
- Mettre en valeur bien des faits occultés : en effet si on admet que l'Afrique est le berceau de l'humanité , il faut admettre aussi qu'elle a vu naître la première grande civilisation , celle de l'Egypte ancienne dont les racines africaines ne peuvent plus être niées grâce à des travaux historiques majeurs réalisés au cours des dernières décennies et notamment par des historiens africains( e.a. Cheik Anta Diop et Théophile Obenga);
- Mettre en exergue à la fois la globalité et la complexité de l'histoire du continent africain;
- Donner à lire et à voir une historiographie qui met l'accent sur les facteurs de changements ainsi que les grandes mutations qu'ils engendrent;
- Esquisser la problématique des sources et dégager l'importance de l'archéologie et de la tradition orale;
- Balayer certains préjugés tenaces qui attribuent tous la plupart des changements à des interventions extérieures au continent (les ruines du Zimbabwe démentent de tels a priori);
- Montrer les conséquences à long terme de certains faits majeurs comme la traite négrière à la lumière notamment des plus récentes recherches ;
- Faire une relecture de la colonisation dans sa portée économique , socioculturelle et politique et montrer les formes de résistances africaines;
- Proposer une synthèse des problèmes de l'Afrique postcoloniale face notamment à la problématique de la mondialisation.
Notre séminaire contribuera donc à relecture de l'histoire africaine à même d'être utile aux cadres et aux futurs cadres , et à toute personne qui s'intéresse peu ou prou à l'Afrique. Il s'efforcera de leur permettre de bâtir une mémoire africaine débarrassée des erreurs grossières et des clichés, à prendre en compte certaines spécificités africaines de manière à ce que ce continent puisse se comporter en partenaire, à part entière, et non plus entièrement à part, d'autres habitants de la planète, et de les enrichir de ses valeurs spécifiques. Cela à l'heure où la mondialisation signifie pour certains l'imposition des dogmes économiques, politiques , juridiques et culturelles dont la transplantation n'est pas sans poser des problèmes.
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