jeudi 29 mars 2007

Conférence inaugurale


Extrait de l’introduction de la conférence inaugurale :

« J’adresse mes remerciements les plus vifs aux responsables du Cercle des Etudiants de l’ULB pour avoir pensé à ma modeste personne pour la conduite et l’animation de ce séminaire.Cet honneur qui me réjouit se traduit pour moi par une redoutable responsabilité , celle de synthétiser pour un public exigeant il va de soi et divers par sa composition une matière Complexe et nullement soluble dans des formules toutes faites.
Il m’appartient de relever le gant. C’est un pari certes qu’il m’échoit de relever et en même temps la tâche s’avère pour le moins exaltante.Je vous propose un exposé synthétique de l’histoire du continent africain articulée en six chapitres dont je rappelle les intitulés (…).
Tel quel le projet paraît ambitieux voire démesurée ,notamment au vu des contraintes liées au temps qui m’est imparti.
Il me paraissait essentiel de rappeler en effet que la préhistoire africaine constitue un domaine extrêmement riche et la plupart des recherches ont conclu à ce fait majeur que nous ne devons pas perdre de vue à savoir que l’homme a son berceau en Afrique.
Par ailleurs, le sol africain étant littéralement jonchée de vestiges préhistoriques selon le mot d’un historien célébre (J. Ki-Zerbo pour ne pas le citer), la poursuite de recherches portant sur cette période est riche de toutes les potentialités (fouilles de Sanga, Os d’Ishango). La prise de conscience des enjeux liés à ce type de chantier est loin pourtant de mobiliser les gouvernements. J’ose croire que les cadres que vous êtes pourraient contribuer suite à ce séminaire à la prise de conscience dont le monde politique africain a besoin pour agir efficacement dans ce domaine.
La préhistoire et les antiquité africaines ne pouvaient être absents de ce parcours.
L’Egypte pharaonique, la Nubie ne pouvaient être éludées. L’Egypte, la première civilisation humaine a pour cresuet l’Afrique, elle est partie intégrante de l’histoire du continent n’en déplaise à ceux qui ont voulu l’en détacher. Les plus recherchers les plus récentes et les plus crédibles nous permettront de prendre la mesure de l’apport égyptienne au complexe culturel Négro-africain. Il nous faudra aussi en toute rigueur faire le départ entre les faits établis et les fantasmes et autres récupérations parfois douteuses.
Tout au long de notre parcours nous mettrons l’accent sur les peuples, sur leurs structures socio-politiques, sur les mutations qui ont caractérisées les sociétés africaines, sur leurs créations culturelles, sur leurs réseaux d’échanges et les tranferts qui ont eu lieu sur le continent loin de toute idée de stagnation ».


Objectifs assignés au séminaire :

Tout en se référant au texte de présentation du séminaire, diffusé sur l’Internet par Le Cercle des Etudiants Africains de l’U.L.B., le Docteur Antoine Tshitungu Kongolo a insisté sur la nécessité pour chacun de se défaire d’une certaine vision manichéenne et simpliste, consistant notamment à opposer la légende rose des civilisateurs aux temps présents, marqués par la violence et la barbarie.

Il a dressé de manière succinte le bilan des avancées insignes dans le domaine de l’histoire africaine. C’est ainsi qu’il a pu mettre en lumière la part spécifique des historiens du continent comme Cheik Anta Diop, Théophile Obenga, Joseph Ki-Zerbo, Djibril Tamsir Niane et quelques autres. Il ressortira de ce parcours exemplaire toute l’importance qu’il sied d’accorder aux renouvellements des méthodes de recherche, lesquelles allient dans le meilleur des cas à l’interdisciplinarité la plus féconde et l’universalisme.

Pour le conférencier, le séminaire sur l’histoire africaine devrait déboucher a minima sur une prise de conscience indispensable, à savoir la prégnance des préjugés hérités de l’historiographie déformante et mutilatrice des colonisateurs omniscients.
En révelant la dynamique des échanges sur le continent du nord au sud, en faisant au passage un pied de nez aux morcellements factices entre Afrique blanche et Afrique noire. Il ne s’agit plus du reste de la décrire comme une poussière de tribus mais comme un continuum avec ses axes d’échanges, sa diversité et ses traits communs.

Au surplus, le séminaire devrait amener chacun à pouvoir combler à sa manière le besoin d’histoire qui nous taraude tous.
En somme, l’orateur a invité chaque auditeur à la relecture, loin des clichés scolaires qui nous collent tous à la peau de certains faits majeurs comme la traite négrière ou la Conférence de Berlin, à laquelle on alloue comme tâche principale le tracé des frontières.

Séance du 14 mars

La séance du 14 mars 2007 a porté respectivement sur la préhistoire africaine (ses spécifités et son legs) et sur L’Egypte ancienne et la Nubie.

Au cours de l'exposé de l’orateur, le Docteur Antoine Tshitungu s’est penché sur les trois âges de la préhistoire africaine pour en dégager les étapes et ses spécificités. Il en a esquissé le cadre chronologique et climatique en rappelant que les glaciations aux latitudes nordiques et celles des périodes inter-glaciaires ont scandé le pléolithique.

Le premier âge de la pierre et ses créateurs
Il s’est étalé sur plus d’un million d’années; c’est l’époque des Australanthropiens et des Archantropiens.
La civilisation des Australanthropiens
Le Proconsul (Proconsul Africanus) est l’intermédiaire le plus ancien et l’un des plus typiques entre les primates préhominiens et l’homme (25 millions d’années). Le Kenyapithecus Wickeri (12 millions d’années); l’Australopithecus Prometheus (usage du feu); le Zinjathrope, découvert à Olduvai (Tanzanie) par le Docteur L.S.B. Leakey (1.750.000 ans par la méthode de datation du potassium-argon et en 1963 des fossiles de l’Homo Habilis, à la première place dans la galérie de nos ancêtres, 1.500.000 années.
Sur les rives de l’Omo en Ethiopie, près du Soudan et du Kenya, on a trouvé des fossiles qui remontent à 3.700.000 ans.
Un gros australopithèque, végétarien et un petit hominien, omnivore, ont cohabité pendant 2.000.000 années.
En 1961, le Tchadanthropus Uxoris est découvert par Y. Coppens et sa femme au pied de la falaise d’Angamma dans le Nord du Tchad. Il constitue le maillon (crâne et fémur exhumés) manquant entre l’Australopithèque et le Pithécanthrope.

La civilisation des Archanthropes(750.000 ans)
Voici quelques spécimens d’Archantropes qui usent du langage articulé :
Phitécanthropus Mauritanicus de Ternifine en Algérie, Africanthropes d’Afrique centrale, en Asie (Pithécanthrope de Java, Sinanthrope de Pékin, en Europe (Homme de Mauer en Allemagne).
La plupart des savants considèrent que les hominiens africains ont inventé les premiers outils et les ont diffusé dans les autres continents.

Le deuxième âge de la pierre et ses créateurs
La civilisation des Paléanthropiens ou Néandertaliens et de l’homo sapiens (faber). En Tanzanie, à Eyasi; à Kidishi en Ethiopie; l’homo rhodesiensis, en Zambie à Broken Hill.

Le troisième âge de la pierre
La civilisation des Néanthropiens (Homo sapiens).
Spécimens : Homme de Grimaldi, près de Monaco (négroïdes) et aussi en Illyrie, au Piémont, en Suisse, dans les Balkans, en Indochine, dans le Yunnan(Chine) et en Malaisie! Extension pluricontinentale de l’aire d’occupation des négroïdes.
Concluant ce volet de son exposé, l’orateur a rappellé que le continent africain est le berceau de l’humanité. Que les vestiges préhistoriques ont encore beaucoup à nous apprendre et que le patrimoine légué par les premiers ancêtres de l’humanité est essentiel. Il conviendrait dès lors de financer localement des recherches archéologiques et d'y associer les archélogues aux études préalables à la réalisation des grands chantiers d’infrastructures de manière à préserver les vestiges du passé.

Ensuite il a énuméré les sources qui ont permis à l’élaboration de l’histoire de l’antiquité égyptienne étalée sur 3000 ans en continu.
Il a rappellé qu’après la conquête romaine les hiéroglyphes sont devenues illisibles pour les Egyptiens. C’est Champollion qui en déchiffrant la pierre de Rosette en 1822 donnera des nouvelles implusions à l’Egyptologie en permettant de comprendre les textes et en révélant au monde scientifique la complexité de l’écriture égyptienne.

L’orateur s’est ensuite penché sur la chronologie :
- L’Ancien Empire : de la 1ère à la 12ème dynastie ( -3500 à -2000).
Les deux premières dynasties établies à Memphis ont dû consolider les fondements socio-politiques et artistiques déjà existants. Les 3ème et 4ème dynasties se sont signalées par les grandes pyramides de Chéops, Képhren et Mykérinos.
- Le Moyen Empire : de la 12ème à la 18ème dynastie (-2000 à -1580)
Le restaurateur venu du sud sous le signe du Dieu Amen, c’est Aménhémat 1er qui refoule vers l’Asie les Khetos (Hykos) après avoir restauré l’ordre et en particulier les temples, les cultes et le Livre des morts. Dès la 13ème dynastie, les invasions reprennent de plus belle .
C’est le moment où le Joseph de la Bible est appelé par un de ces rois pour lui servir de ministre, ce qui accrut considérablement la colonie juive.
- Le Nouvel Empire ( -1580 à -1100)
- Aménophis 1er venu du sud rejette les envahisseurs s’établit à Thèbes : deux siècles de paix et de prospérité. Sous les Ramsès, essor prodigieux de la civilisation alliance entre Egyptiens et Nubiens contre les Achéens dits peuples de la mer (Aménophis IV et Tout-Ank Amon).
- De la 18ème à la 24ème dynasties, le royaume nubien de Koush intervient de plus en plus dans les affaires d’Egypte (imposition de la dynastie Saîte par les Assyriens).
- Conquête de l’Egypte et instauration de la 25ème dynastie dite éthiopienne.

KOUSH ET MEROE
Au sud de la première cataracte, la Nubie va devenir un arrière-pays d’exploitation pour l’Egypte avant d’imposer son dominium à toute la vallée et de succomber à son tour sous les coups des Asiatiques.
Dès les premières dynasties égyptiennes, la conquête par les armes est suivie d’une exploitation commerciale du Koush (peaux de léopards, encens, ébène, ivoire).
La langue méroïtique n’a pas encore été déchiffrée. Sa connaissance donnerait de ces événements une version différente de celle des Egyptiens et sans doute complémentaire.
Au surplus, la Nubie constitue l’avant-poste vers des pays situés encore plus au Sud : Pount (Somalie ou Kenya ou le Soudan central ).
Coupure entre Egypte et Koush, entre -660 à 350, le royaume de Napata va connaître une évolution assez isolée, la capitale fut transportée de Napata à Méroë.
Suivra la périodes des reines; les Candaces qui opposent une résistance aux invasions étrangères.

Le Docteur Tshitungu a développé avec force détails les caractéristiques de la société égyptienne du point de vue socio-politique : caractère hiérarchique très strict de la société.
Au sommet de la pyramide sociale, le Pharaon qui participe de la divinité.
La femme était beaucoup plus libre que dans de nombreux pays modernes : place éminente des mères du roi, dévolution des biens fonciers par les femmes, existence d’un clergé féminin et identification des gens par référence à leur mère.

Il a par ailleurs souligné que l’administration de l’Egypte est issue de la nécessité de contrôler un peuple très dense de paysans. Elle est très spécialisée et hiérarchisée.
La cheville ouvrière de tout cet appareil, c’est le scribe (percepteur et comptable), omniprésent.
Le patron de scribes, c’est le Dieu Thot. Clé de voûte du corps de scribes et fonctionnaires, c’est le vizir (Tjaty), sorte de premier ministre.

Il a décrit avec force exemples ce que l’Egypte nous a légué dans les sciences , l’Art (architecture, sculpture, gravure, peinture) et la religion.


EGYPTE NEGRE : positionnements et arguments en présence

Le Docteur A. Tshitungu Kongolo a exposé en détail la thèse de Cheik Anta Diop relative aux racines égyptiennes de la culture nègre telles qu’il l’a exposée dans ses ouvrages et notamment dans « Nations nègres et cultures » (Paris, Présence Africaine, 1979, 1ère édition, 1954). Par la suite, il s’emploie à confronter les arguments de l’illustre sénégalais à ceux de ses pairs et les confronter point par point aux critiques de ses pairs historiens, qu’ils soient Africains, Européens ou autres.

Voici les traits culturels mis en avant par le savant sénégalais afin d’asseoir son argumentation :
- Totémisme ( Op.Cit., pp204-206)
- Circoncision : d’après Cheikh Anta Diop, ce sont les Egyptiens qui ont transmis cette pratique aux Juifs et aux Arabes.(cfr « Nations nègres et culture », Op.Cit., pp206-209) ;
- Royauté : l’illustre historien met en exergue une pratique commune à l’Egypte antique et à l’Afrique Noire : la mise à mort rituelle du roi.(p 209 et sq.)
- Cosmogonie : il relève à la fois des ressemblances et une complémentarité des cosmogonies égyptienne, d’une part, et nègre, d’autre part (p211 et sq.);
- Organisation sociale : cfr p214
- Matriarcat : p214 et sq. Il souligne la vivacité du matriarcat en Afrique ;
- Parenté de l’égyptien et des langues nègres : p231 et sq.


Les réactions de ses pairs méritent d’être relevés et verser au dossier de ce débat passionnant : Joseph Ki-Zerbo : « Est-ce à dire pour autant que tous les Egyptiens, du début à la fin de l’antiquité aient été des Noirs ? Evidemment non. Bien que le type grec soit pratiquement inexistant, de nombreuses effigies montrent aussi des types de pharaons ou de simples mortels qui n’ont rien de négroïde. » (Histoire générale de l’Afrique, Hatier, p 80)

« (En conclusion,) il nous semble donc que les Noirs ont dû constituer la majorité de la population dans l’antique vallée du Nil, au moins dans les premiers temps protohistoriques et historiques et dans les zones méridionales. Ils ont joué un rôle de premier décisif dans l’établissement de la civilisation égyptienne. Et nombre de grands hommes de l’histoire égyptienne étaient des Noirs. » (p81)
« Néanmoins des parentés culturelles puissantes ont subsisté entre les deux zones de dispersion des peuples depuis le Sahara, et cela, non pas comme on l’a dit parce que les Noirs sub-sahariens actuels sont venus d’Egypte (simple hypothèse). Mais parce que, d’une part, leurs lointains ancêtres ont partagé la même expérience historique que les Egyptiens dans les vertes prairies du Sahara néolithique, faisant alors partie de la ême aire culturelle avant la diaspora des 4° et 3° millénaires.» (p82)

Par ailleurs, au cours du colloque sur « Le peuplement de l’Egypte ancienne et le déchiffrement de l’écriture méroïtique », le Caire du 28 janvier au 3 février 1974, un débat nourri entre Cheikh Anta Diop et un certain nombre de ses pairs aura permis de dégager les lignes de fractures entre les chercheurs. A titre d’illustration, certains arguments méritent d’être évoqués comme contribution au débat :
Le professeur Leclant insiste sur le caractère africain de la civilisation égyptienne , mais il met l’accent sur la nécessité de distinguer « race » et « culture ».
Pour le professeur Abdelgadir M. Abdalla, « il importe peu de savoir si les Egyptiens anciens étaient noirs ou « négroïdes; l’important est le degré de civilisation auquel ils sont parvenus » (p.801).

Par ailleurs, le rapport souligne que « les preuves fournies de parenté plaident bien plus en faveur de la dispersion de l’égypte ancien en Afrique que de sa parenté avec les langues africaines actuelles. Pourquoi n’y aurait-il de parenté qu’entre l’égyptien ancien et le wolof et pas entre l’égyptien ancien et le méroîtique par exemple? Or la langue de napata et l’égyptien sont aux antipodes l’un de l’autre.» (p802)

Pour le professeur Théophile Obenga : «les rencontres morphologiques, lexicologiques et syntaxiques obtenues constituent une preuve péremptoire de la parenté étroite de l’égyptien ancien et des langues négro-africaines d’aujourd’hui.» (p 803)

Parmi les recherches récentes, il convient de signaler, sans nulle souci d’exhaustivité, l’important travail de Babacar SALL, « Racines éthiopiennes de l’Egypte ancienne »[1].

Ce dernier ouvre de perspectives sur les relations entre l’Egypte et la Nubie (l’Ethiopie des Anciens).
« Il y a aussi loin que l’on remonte le temps , l’Afrique apparaît comme une terre de migrations et l’Egypte comme un finistère à l’angle Nord-est du continent pour HERODOTE, l’Egypte est aux confins de la Lybie (Afrique) et de l’Asie(II,17). Cette position faisant de l’Egypte un creuset. Aussi Memphis ne pouvait pas ne pas devenir au cours du temps une ville grande et populeuse, avec plusieurs races d’hommes (STRABON, XVII,1,24).
"C’est par ce fil que nous cherchons à cerner les apports extérieurs même si pour l’essentiel, la civilisation ne se comprend qu’en relation avec l’ambiance de la basse vallée du Nil et du fleuve lui-même.» (Op.Cit.,p19)

Le Docteur A. Tshitungu Kongolo a rappelé que la thèse de la parenté entre l’Egypte antique et l’Afrique Noire avait séduit un certain nombre d’intellectuels noirs, et ce, dans la période de l’entre-deux-guerres, qui militaient en faveur de l’autonomie politique de l’Afrique et contre le racisme colonial et ses avatars. L’on en retrouve des traces dans leurs écrits ainsi que leurs prises positions. Le Congolais Paul Panda Farnana en est un exemple
Et ses propos au sujet de l’Egypte méritent mention :
"L’art nègre a toujours exercé et exerce une influence sur l’esthétique moderne, notamment dans la littérature (Dumas, Maran, etc.) dans la peinture et la sculpture.

Je dis, toujours exercé, parce que les études d’Elysée Reclus le prouvent; il suffit de consulter "La géographie universelle", où il affirme ceci:"Il est certain que la civilisation est bien d’origine africaine".
Des maquettes et des peintures que M. le professeur Capart commente et explique si clairement montrent des vassaux sous des pharaons ayant des traits soudanais et congolais". (Extrait de la réponse de Paul Panda à une enquête de La Renaissance d’Occident, n°1 janvier 1930, numéro spécial sur le Congo).

De nombreuses questions ont été posées par les participants au sujet du caractère nègre de l’Egypte ancienne. L’orateur s’est efforcé de répondre avec calme et méthode en dépit de la tendance de certains participants à mettre en avant leur subjectivité.
Il est au moins acquis que le caractère audacieux des thèses de Cheikh Anta Diop constitue un moment important de l’Egyptologie. L’Egyptologie elle-même est le fruit d’efforts multiples et l’on ne peut ignorer ou minorer l’apport d’un Champollion.
Le rejet systématique de toute hypothèse nuançant ou contredisant Cheikh Anta Diop au nom du prétendu racisme des chercheurs « leucotermes » n’aide pas le débat. Certains disciples proclamés de Cheikh Anta Diop n’ont pas la rigueur ni la modestie du maître et tendent à faire de ce dernier des lectures sommaires conformes à leur propores désirs. Par ailleurs, l’on ne peut préjuger d’avance des avancées en matière d’archéologie notamment. Le patrimoine que l’Egypte a légué à l’humanité est en lui même d’une richesse incommensurable.



[1] Préface de Théophile Obenga, L’Harmattan/Khepesa, 452 p. (Thèse dirigée par C.A. Diop lui-même).

lundi 26 mars 2007

Biographie

Romancier, poète, nouvelliste et essayiste, Docteur ès Lettres de l'Université de Lille III, Antoine Tshitungu Kongolo, titulaire de plusieurs prix littéraires internationaux témoigne par ses nombreux chantiers d'écriture de la volonté de renouvellement de l'engagement de l'écrivain au service des communautés souffrantes. De même oeuvre-t-il à une relecture de l'histoire et singulièrement celle de l'Afrique centrale à l'aune d'une exigence de rigueur susceptible de contrer les stéréotypes d'antan aussi bien que les mirages d'authenticités biaisées. Sa poésie s'inscrit tout simplement au coeur de la modernité et de l'universalité. Ancien chercheur aux Archives et Musée de la Littérature et à la Cellule littéraire du Ministère de la Communauté Française de Belgique, Antoine Tshitungu Kongolo est bibliothécaire à Bruxelles. Il est par ailleurs chercheur à l'Université Charles de Gaulle de Lille3.

Informations pratiques

Plan du Séminaire
Conférence 1 (7 mars 2007)
Introduction générale
Chapitre I Problèmes et méthodes
Conférence 2 (14 mars 2007)
Chapitre II La Préhistoire
Chapitre III L'Egypte ancienne et la Nubie
Conférence 3 (21 mars 2007)
Chapitre IV L'Afrique du Xè au XIVè siècle
Conférence 4 (28 mars 2007)
Chapitre V Du XVè au XIXè siècle
Conférence 5 (18 avril 2007)
Chapitre VI De la colonisation aux indépendances
Conférence 6 (25 avril 2007)
Chapitre VII Les problèmes de l'Afrique post-coloniale et contemporaine
Conclusions
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Conférencier et responsable en charge du séminaire :
Antoine Tshitungu Kongolo
Docteur ès Lettres
Lieu : Campus Solbosch, Salle UB5.230
Les mercredis de 18 à 20 heures
***
Soyez les bienvenu(e)s pour réécouter la chronique hebdomadaire du Professeur Antoine Tshitungu sur l'émission de radio Africana,
Radio Campus,
tous les jeudis entre 19h30 et 21h30, 107.2FM

Histoire et mémoire africaines

Histoire et mémoire africaine à l'heure de la mondialisation:

Enjeux et repères

L'écriture de l'histoire africaine soulève toute une série de questions qu'on ne saurait occulter. Parmi ces dernières, celle de savoir si la lecture que les peuples d'Afrique ont du passé de leur continent leur donne des balises suffisamment pertinentes pour leur permettre de capitaliser les expériences d'hier et prendre en charge leur destin, aujourd'hui et demain. Tout aussi cruciale l'émergence d'une mémoire débarrassée de tares du discours colonial et s'inscrivant dans une véritable prospective car on ne peut se développer avec la mémoire d'autrui.

Le passé est une somme d'expériences comportant d'innombrables leçons pour l'avenir. Prétendre que l'Afrique fut une table rase au plan politique, scientifique, technique a imprégné bien des discours d'antan conforme à la vulgate coloniale avec sa propension à la minorisation tendant à assimiler le riche passé africain à une succession des siècles obscurs.

Ces positionnements d'antan redevables davantage à l'idéologie qu'à la rigueur des faits aura porté les Africains à des mimétismes stériles qui n'ont fait qu'accroître leur dépendance.

De 1960 à nos jours, les recherches en histoire africaine ont véritablement révélé des « terrae incognitae », éclairés des pas obscurs et contribué à restituer son visage à un continent au passé défiguré.
Au cours de notre séminaire l'histoire africaine sera abordée à la fois dans sa globalité et sa complexité; l'accent sera mis à la fois sur ses dynamiques internes et externes. Nous mettrons l'accent sur la diffusion des techniques, l'organisation sociale et économique, sur les traits culturels des peuples. Nous n'occulterons pas les problèmes spécifiques ainsi que les difficultés bien réelles que pose l'écriture de cette histoire et notamment en termes de sources et de méthodologie. Nous dégagerons à la lumière des plus récentes études la continuité historique depuis l"Egypte ancienne" à nos jours. Nous mettrons en lumière l'importance de la tradition orale comme source de l'histoire.

Le terme mondialisation n'apparaît pas dans notre propos par hasard : D'aucuns ont prétendu que l'Afrique en raison de "son passé" avait du mal à s'intégrer dans les réseaux d'échanges qui restructurent notre monde d'aujourd'hui, que sa culture est celle "de la stagnation" voire du rejet de l'autre.

Et pourtant l'histoire nous apprend la densité des réseaux d'échanges au cours des siècles écoulés comme la capacité des peuples à réaliser des symbioses remarquables .L'ancienneté des structures étatiques est tout aussi incontestable.

Les objectifs du Séminaire sont les suivants:

  • Pallier les carences voire l'absence dans le cursus universitaire de cours et formation accessibles à tous portant sur l'histoire de l'Afrique;
  • Doter les participants de balises nécessaires à la compréhension du parcours spécifique des peuples africains depuis la préhistoire jusqu'à ce jour;
  • Mettre en valeur bien des faits occultés : en effet si on admet que l'Afrique est le berceau de l'humanité , il faut admettre aussi qu'elle a vu naître la première grande civilisation , celle de l'Egypte ancienne dont les racines africaines ne peuvent plus être niées grâce à des travaux historiques majeurs réalisés au cours des dernières décennies et notamment par des historiens africains( e.a. Cheik Anta Diop et Théophile Obenga);
  • Mettre en exergue à la fois la globalité et la complexité de l'histoire du continent africain;
  • Donner à lire et à voir une historiographie qui met l'accent sur les facteurs de changements ainsi que les grandes mutations qu'ils engendrent;
  • Esquisser la problématique des sources et dégager l'importance de l'archéologie et de la tradition orale;
  • Balayer certains préjugés tenaces qui attribuent tous la plupart des changements à des interventions extérieures au continent (les ruines du Zimbabwe démentent de tels a priori);
  • Montrer les conséquences à long terme de certains faits majeurs comme la traite négrière à la lumière notamment des plus récentes recherches ;
  • Faire une relecture de la colonisation dans sa portée économique , socioculturelle et politique et montrer les formes de résistances africaines;
  • Proposer une synthèse des problèmes de l'Afrique postcoloniale face notamment à la problématique de la mondialisation.

Notre séminaire contribuera donc à relecture de l'histoire africaine à même d'être utile aux cadres et aux futurs cadres , et à toute personne qui s'intéresse peu ou prou à l'Afrique. Il s'efforcera de leur permettre de bâtir une mémoire africaine débarrassée des erreurs grossières et des clichés, à prendre en compte certaines spécificités africaines de manière à ce que ce continent puisse se comporter en partenaire, à part entière, et non plus entièrement à part, d'autres habitants de la planète, et de les enrichir de ses valeurs spécifiques. Cela à l'heure où la mondialisation signifie pour certains l'imposition des dogmes économiques, politiques , juridiques et culturelles dont la transplantation n'est pas sans poser des problèmes.